Crédit photo : C.B. |
Novak Djokovic et Rafael Nadal ont redéfini à Melbourne les contours d'un sport qu'ils dominent. Que dire de plus sur leur finale historique de 5h53' ? Que regarder ces deux champions en découdre toutes tripes dehors a été un des plus grands moments de ce sport. Pas une seconde d'ennui tant le combat a été ultime. Le Serbe, impressionnant dès le premier tour, a encore fait plier l'Espagnol à coup de retours dignes - voire supérieurs - d'Agassi, des revers croisés ou long de ligne d'une précision quasi jamais vue et de cette faculté à rester sans arrêt sur sa ligne. On salue de nouveau les progrès monstrueux accomplis en coup droit et qui font maintenant de ce coup une arme et plus un point faible. Murray a commencé à s'en inspirer, il était temps. Le Djoker avait la taille patron sur et hors du court à Melbourne, affichant une sérénité qui a de quoi glacer le sang de la concurrence. Le sourire aux lèvres, la blague jamais loin et les yeux rivés vers l'objectif. Ce n'est plus de la confiance, c'est de l'acier trempé dans les veines. Petite mention spéciale pour son amie Jelena qui a apporté un soutien incroyable dans le box en demies et en finale, debout quasi sur tous les points dans le money time : on n'avait rarement vu ça.
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Et comment ne pas avoir un bout de coeur brisé pour Rafael Nadal ? Il fallait le voir se battre sur tous les points de cette finale... Il fallait sentir combien il avait envie de gagner... Mais la meilleure façon de ne pas le plaindre, on l'a eue lors de sa conférence de presse. Epuisé, battu, le n°2 mondial n'était pas abattu. Toujours très lucide, il a confié avoir joué son meilleur match depuis longtemps - il avait raison -, s'être rapproché de Nole et, surtout, avoir retrouvé l'attitude qui lui permettra de gagner d'autres Majeurs. Une vraie leçon. Certains lui ont reproché de trop s'étendre sur ses états d'âme en conf de presse et en général mais pour rien au monde je n'ai personnellement envie de voir ce joueur transformé en robinet d'eau tiède. On n'a jamais eu un champion de ce calibre si sincère dans les bons comme les mauvais moments, on n'a jamais eu un cador si humble et lucide, on n'a pas souvent eu un champion avec une telle analyse du jeu. Il fallait l'entendre parler du match de Murray contre Djokovic : un vrai coach. Non, vraiment, Rafael Nadal n'a rien perdu à Melbourne. Il reste, à mon avis, le seigneur de ce tennis mondial. Il n'y a pour moi aucun doute que les tournois du Grand Chelem vont bientôt retomber dans son escarcelle. Mais il lui faudra quand même trouver la clé face à Djokovic. Cela passe par des progrès en revers évidemment et par, comme il a commencé à le faire, un jeu tourné plus vers l'offensive. Leur duel est en train de porter le jeu à une nouvelle dimension, j'attends donc avec impatience le prochain épisode.
Ne pas oublier Murray. L'Ecossais a retrouvé la créativité et l'audace de ses débuts. Piqué au vif par l'ascension de son copain d'enfance Djokovic, le n°4 mondial a repris sa carrière par le bon bout. La demi-finale livrée contre Djokovic a été un monument. Bien meilleure que la lutte entre Nadal et Federer. Tennistiquement, Murray est sans doute le joueur que Djokovic aime le moins rencontrer. Ils se ressemblent trop, la brèche est dure à trouver. Je ne peux pas imaginer un quart de seconde que ce joueur d'exception ne remporte jamais un tournoi du Grand Chelem. Qu'il n'oublie pas qu'on prédisait aussi à Djokovic de devoir se contenter des miettes et que, comme le Serbe, il enfonce la porte. Il en a les moyens. Et ce serait tellement mérité. Que dire enfin de Roger Federer ? Qu'il a retrouvé un énorme niveau de jeu. Mais que cela ne suffit toujours pas à passer l'obstacle Nadal. Dans la tête et dans le jeu, le gaucher de Manacor garde une intensité que le Suisse ne peut pas défier dans les Majeurs. Physiquement et mentalement, tenir la lutte plus de deux sets semble devenir un véritable problème. Qu'aurait-il fait contre Djokovic et Murray ? Peut-être gagné. Ou pas. Car cette année à Melbourne, la vitesse de jeu et la science du contre/défense déployées par ces deux-là était à mon avis encore supérieure à la sienne. Dans ce Big 4, il fait figure d'ancien face à une meute de trois jeunes joueurs assoiffés de pouvoir. Combien de temps tiendra-t-il le bras de fer ? Je maintiens qu'il lui faudra désormais un concours de circonstances favorables, comme un accident de parcours de Rafa ou Djoko, pour décrocher un nouveau titre du Grand Chelem. Ce n'est pas impossible. Cet Open d'Australie 2012 a donc lancé de manière exceptionnelle une saison 2012 qui promet d'être un grand cru. Comme d'autres, je suis d'avis que jamais le tennis n'a eu un Top 4 aussi fort, talentueux et dominateur que celui qui évolue sous nos yeux actuellement. Profitons-en.
Et pourtant, Federer gagna Wimbledon six mois plus tard :p
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